Irradié… à jamais !

C’était le 26 novembre 2013. 

Je ne savais pas que c’était la dernière fois que j’allais être irradié de ton énergie démesurée. Quatre ans et quatre mois déjà. Pourtant c’est encore tellement là en moi. Beau repaire restera pour moi ton dernier album, mon dernier refuge, et ce concert au Zénith notre dernier délire, annonciateur de l’album suivant avec des musiciens en fusion et ta fille, ô combien « si touchante ». J’entends encore sa voix…


« Je suis du village l’idiot et j’entends les rumeurs de la villeuuuu ! »

Un cri déchire le rideau, jusque-là invisible, qui venait de tomber sur la scène.

Izia

La bouille de son père, la banane et la voix en canons, la môme Izia klaxonne…
24-9-90, sa p’tite gonzesse qui a vu le jour et qui réapparait là, à nouveau dans la nuit, avec ce même cœur dans la gorge, cette même rage en dedans du père…

l’irradié, le sage, le fou, le débile.

« Je suis du village l’idiot et j’entends les rumeurs de la villeuuuu ! »

Hou ! Tout le Zénith frissonne. On ne peut l’être moins. Le père s’émeut visiblement. Embrassades, étreinte physique autant que musicale. Ils s’aiment assurément.

Un final d’anthologie, plus d’une demi-heure d’irradiation qui a contaminé toute la scène jusqu’au public transporté depuis deux heures dans cet immuable aéroplane blindé qu’est un concert de Jacques Higelin,  pour un voyage extraordinaire au bout de la nuit.

Derniers instants, dernière capture

Tout a commencé vers 20h30, ce mardi, quand l’artiste à son Zénith, avec un dernier album aussi beau qu’abouti (Beau repaire, à lire ici >>), a fait son entrée dans un délire d’alarme où, de ce monde à la dérive, barré comme un bateau ivre, il se fait d’un soir commandant de bord.

Et il faut le voir sur sa guitare nous emmener de Paris à New York, dans un aller-retour fulgurant et vivifiant, nous extirpant de notre torpeur, de cette asphyxie ambiante avec une énergie en trois syllabes qui fait écho jusque dans nos cœurs.

Un retour arrière à ses débuts sous le groove d’un Mona Lisa Klaxon ou d’un Œsophage Boogie, cardiac’blues au son de cuivres endiablés et surtout de la basse retrouvée du vieux pote, Eric Serra.

Ca déménage, on est scotché, Jacquot en reste muet d’émotion.

Et la nuit promet d’être belle car voici qu’au fond du ciel apparaît là, une rousse… au chocolat. On s’en délecte. De la gare de Nantes à celle d’Angoulême, tout s’enchaîne. Comme ce duo d’anges heureux formé avec une Sandrine Bonnaire, femme fatale d’un soir, saisie d’une sainte frousse que tout le commun des mortels croit voir à ses trousses. Troublante et troublée, déraillant parfois, elle rattrape le train de sa voix tremblante  étranglée dans un moment de partage et de grâce intenses.

La vie n’est pas faite de hasard, nous confie-t-il, mais de belles rencontres comme celle-ci.

On veut bien le croire. Et puis vient cet instant magique, cette communion ultime avec tous, le public, ses musiciens, mais avec elle avant tout.

Trombone, sax et trompette, ouvrez lui le passage… Et vous magicien pervers, faites entrer vos instruments de ménage… Prévenez de ma part mes amis nécrophages que ce soir ils sont  priés de rester dans leurs marécages.

Voici mon message : cauchemars, fantômes et squelettes, vous pouvez ranger vos idées noires, près de la mare aux oubliettes, tenue du suaire au placard !

Irradié, voyageur immobile,
Irradié, je suis le sage, le fou, le débile et…

 Izia fera le reste… inoubliable !

Mais déjà le ciel blanchit.  Jacquot, on te remercie de nous avoir si bien reçus.

Toi l’ami qui soigne et guérit la folie qui nous accompagne et jamais ne nous a trahi.

(article publié ici le 30 novembre 2013)

Merci pour tout, Jacques… pour tes mots, ta musique et tous ces moments privilégiés, pour ce que tu es et restera pour moi, à jamais… une inspiration éternelle. Ciao l’artiste !

Comme un air de campagne…

On y entre par la porte des Lilas ou celle du Pré Saint Gervais, entre le parc de La Villette, celui des Buttes Chaumont, la rue de Belleville et le périphérique, une enclave bucolique, un hameau pittoresque, un petit air de province qui vous prend là.

La campagne à Paris, ça n’est pas que le square de Montsouris ou le petit îlot pavillonnaire historique de la porte de Bagnolet, c’est aussi le 19ème arrondissement, son quartier du Danube jusqu’aux abords chantants de la rue de Mouzaïa.

Liberté, Egalité et Fraternité…

plus qu’une devise de notre république, triptyque de rues publiques indivisibles, un tableau qui enchante par ses chemins de traverses, villas pavées et fleuries, des réverbères éclairant la scène à chaque passage des artistes en costumes de briques colorées, de céramique et de meulières.

Trois rues que l’on emprunte dans un sens ou un autre, peu importe, tant que l’on n’oublie pas de faire une halte dans ce lieu atypique qu’est le café Aux petits joueurs, rue de Mouzaïa.

Entrée de garage ou bar de routiers, on ne sait trop quoi penser devant cette façade jaune aux allures de province. On entre, c’est grand, des tables alignées comme dans une cantine, au milieu une scène, il ne manquerait plus qu’un feu au milieu de ce campement tzigane pour jazz manouche.

Parce que ce soir, on joue du jazz manouche avec un quartet qui promet autour du guitariste aux doigts affûtés, Michael Gimenez, un violoniste, un contrebassiste et un batteur, tous des pointures, bien chaussés dans leurs instruments.

« Ici on déguste de la bonne musique
et on écoute de bons petits plats ! »

Parce qu’on mange aussi, à la bonne franquette et à la bonne charcutaille, sélectionnée avec soins par le patron, dit Bobosse, un astérisque sur le menu vous raconte pourquoi. Je vous laisse le plaisir de la découverte.

La formule plaît, l’ambiance est conviviale. Tout pour passer une bonne soirée.

Des plats et des prix corrects quand la musique ce soir là était, elle, excellente… de Django à Oscar Peterson en passant par Petrucciani ou encore Duke Ellington… une version de Caravan endiablée !

Aux petits joueurs, vous l’aurez compris, à l’extérieur comme à l’intérieur, le « déparisement » est assuré !

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