Les brèves du Café…

La fête à la virgule

« Fernaaaando Torres, mon ami !

Khalid débarque dans le café, l’écharpe bien serrée autour cou, comme s’il venait de se pendre, un livre à la main.
– Salut Khalid ! lui répond Fernand après avoir relevé la tête de ses nombreuses feuilles griffonnées.
L’écrivain local lui tend la main pour le saluer.
– Holà ! J’te sers pas la main aujourd’hui. Je sors d’une gastro, j’te raconte pas. C’est vraiment la merde putain !
Il enchaîne aussitôt indifférent à la cocasserie de son propos.
– Mais t’as changé de place ! 

Ce qui est formidable avec Khalid c’est qu’il ne le fait même pas exprès. Cette spontanéité inconsciente des mots qui se jouent de lui en devient presque drôle.

Heureusement, Tonio, trop loin dans la salle pour entendre, ne relèvera pas.
– Comme tu vois, répond Fernand. Mes écrits en sont métamorphosés. Incroyable !
– Fais lire !
– Non, non ! … Tu achèteras le livre comme tout le monde, rétorque-t-il en riant.
– Tu parles de livre justement, reprend Khalid, j’suis en train de lire Proust en ce moment. T’as vu ?
Il tend le livre à son mentor littéraire, pas peu fier.
– C’est pas du chiquet !
– Du côté de chez Swann, lit Fernand sur la couverture. Très bon choix ! 

Françoise qui débarquait derrière le comptoir et avait tendu l’oreille, jette un regard désabusé sur le jeune lecteur, un tel ouvrage en sa possession, avant de lancer, d’une voix amusée :

– Par quel concours de circonstances tu t’es retrouvé avec Proust dans les mains, dis-moi ?

– Hé hé ! jubile le garçon. T’aimerais bien savoir !
Françoise hausse les épaules et continue d’essuyer ses verres.
– J’te sers quelque chose ? … Un demi ?
Khalid fait la moue, hésitant.
– Wof ! … Je sors d’une gastro, je préfère pas tenter le diable. Euh…
– Tu veux une tisane ?J’ai tilleul-menthe ou verveine, lui propose la serveuse.
– Wof ! … non mets moi un whisky-coca, ça fera passer.

Françoise s’exécute, blasée devant cette automédication masculine de comptoir.

– Merci ! s’adresse le malade à son aide-soignante qui lui tend la collation. Et d’ajouter :
– Si tu veux tout savoir, c’est Nicole qui me l’a prêté.
– Nicole ?
s’étonne Fernand le premier.
– Ah bon, je t’ai pas dit ? semble aussi surpris Khalid. En fait, j’ai sympathisé avec une nana à Pôle Emploi, il y a un mois environ. Elle cherchait un poste dans la même branche que moi, alors…
– Il y a des femmes chauffagistes ? s’étonne à son tour Françoise.
– Hé z’y va elle ! s’insurge Khalid. J’ai fait ça une fois pour dépanner. Moi j’mérite mieux, c’est pas parce que j’ai pas le bac que je dois être que mécano ou plombier.
– Quelle branche déjà ? demande calmement son pote pour ne pas le vexer plus.

– Ah bon, je t’ai pas dit ? … Animation commerciale !

Personne ne la ramène. Juste Tonio retrouve Françoise au comptoir debout et sur le cul.
– Animation commerciale, toi ? lance Tonio.
– Ben ouais, répond sans se démonter le jeune chômeur. L’animation et le commerce ça me connaît !
– Vu comme ça,
sourit Fernand. Mais raconte-nous plutôt Proust si tu veux bien.
– Ben elle était sur son Mac,
reprend Khalid. Il marque une pause. L’ordi je parle, haha ! haha ! s’esclaffe-t-il en se tournant vers Tonio qui ne bronche pas pour une fois, affichant comme les autres de l’impatience.
– Ok, j’abrège, accélère le conteur. Elle bossait sur un fichier Excel et pestait sur une formule version 2010. Alors je l’ai aidée. Je sais pas comment, mais j’ai fini par trouver. On a discuté. Elle m’a expliqué ce qu’elle faisait. C’était cool et je me suis inscrit à un stage avec elle.
– Et Proust ?
insiste Fernand.
– Ah oui ! Un jour qu’on était chez elle, je lui sors une phrase, comme ça, et c’était la même, mot pour mot, j’vous jure, que celle du début de ce livre.

– Longtemps, je me suis couché de bonne heure, récite l’écrivain.

– Exactement, confirme Khalid. Et là illico elle me dit : Proust. C’est tout. Et au final, comme je ne connaissais pas, ben elle me l’a prêté. Voilà !
– Et alors,
l’interroge toujours Fernand, tu aimes ?
– Ben… franchement, c’est relou à lire !
– C’est à dire ?
aimerait bien savoir Françoise, quelque peu irritée.
– Sérieux, ses phrases elles font des kilomètres. Une seule et ça te fait la dictée de Pivot. Attends, attends !
Il ouvre le livre et prend une page plus ou moins au hasard.
– Là, tiens, ça s’invente pas !
Il lit d’une traite.

« Mais si l’on avait dit à ma grand’mère que ce Swann qui en tant que fils Swann était parfaitement qualifié pour être reçu par toute la belle bourgeoisie par les notaires ou les avoués les plus estimés de Paris privilège qu’il semblait laisser tomber un peu en quenouille avait comme en cachette une vie toute différente qu’en sortant de chez nous à Paris après nous avoir dit qu’il rentrait se coucher il rebroussait chemin à peine la rue tournée et se rendait dans tel salon que jamais l’oeil d’aucun agent ou associé d’agent ne contempla cela eût paru aussi extraordinaire à ma tante qu’aurait pu l’être pour une dame plus lettrée la pensée d’être personnellement liée avec Aristée dont elle aurait compris qu’il allait après avoir causé avec elle plonger au sein des royaumes de Thétis dans un empire soustrait aux yeux des mortels  et où Virgile nous le montre reçu à bras ouverts ou pour s’en tenir à une image qui avait plus de chance de lui venir à l’esprit car elle l’avait vue peinte sur nos assiettes à petits fours de Combray d’avoir eu à dîner Ali-Baba lequel quand il se saura seul pénètrera dans la caverne éblouissante de trésors insoupçonnés. »

– Mais ponctue ta lecture, bon sang ! s’insurge Françoise.

– Ouais, rétorque Khalid, si je ponctue trop, j’ai peur qu’elle cale dans la côte, ma lecture !

Rire général masculin. Tonio ajoute :
– J’aimerais pas me la faire à vélo. C’est raide !
Nouveau rire général masculin.
– Vous êtes irrécupérables, se désole la seule fille de la discussion. Vous ne savez pas ce que vous perdez à dénigrer son écriture.
– C’est vrai ou c’est pas vrai, ses phrases elles sont interminables ?
Fernand acquiesce, Françoise hausse les épaules. Khalid ajoute :

– Franchement, Madame Françoise, avec Proust, c’est la fête à la virgule !

– A mon avis, ironise Tonio, à l’époque on devait taxer les livres au nombre de phrases !
Et il se marre tout seul.
– Vous êtes dur quand même avec l’auteur, tempère Fernand. C’est vrai que ça peu paraître abrupt au premier abord mais explorer son univers c’est tout un voyage, parfois éprouvant mais qui selon moi en vaut la peine. Je t’assure, Khalid.
Françoise préfère partir. Elle se rend avec son chiffon au fond de la salle.  

Khalid en profite pour demander à son pote:
– Dis Fernand, tu voudrais pas plutôt me faire une fiche de lecture comme l’autre fois pour Zola.

– Je revois Nicole jeudi, et… ça m’embête d’avoir rien à dire, tu vois !

Vous voulez la suite ?… cela ne dépend que de nous  !

Le décor est planté ! La rubrique Brèves du Café nous attend pour animer ce petit monde selon notre imagination et notre culture sitcom, série télé ou scène de théâtre !

Ne nous fâchons pas !

Les brèves d’Ovalie

Angleterre – France      23 – 13

« N’empêche, de là à marquer de sang-froid, sans parler d’assassinat, y aurait quand même comme un cousinage ! »

On les avait aimés dans « Les caves se ros’biffent ! »… Un quart de finale de coupe du monde en Nouvelle-Zélande où les bleus se rebiffaient déjà contre nos meilleurs ennemis d’outre-Manche. Souvenez-vous !

Quatre matches que nos bleus s’étaient lancé dans la fabrication de fausses valeurs du rugby jusqu’à se faire prendre par la brigade des fraudes contre les Tonga… lire la suite >>

On les a retrouvé nos barbouzes, aussi imprévisibles que fabuleux ce samedi après-midi à Twickenham dans un remake de comédie à la française comme on les aime, surtout quand à la fin les rosbifs sont saignés à blanc de leurs tuniques.

Oui mais voilà, les bleus ne nous ont régalé que la moitié du film que l’on se faisait déjà en admirant Fofana, époustouflant, sensationnel, génial, détaler, enfumer et humilier tout un bataillon de la défense anglaise sur soixante mètres pour aller marquer le premier essai de la partie… et français s’il vous plaît !

« Le dernier né après Saint-André. Quand il perce, tu prends du gaz plein la poire ! »

Et puis plus rien. A l’heure de jeu, on n’avait plus envie de s’exhalter ni de rire à regarder le XV de la Rose réécrire le scénario à l’anglaise où les mangeurs de grenouilles allaient être réduits à manger l’herbe de la pelouse de Twickenham.

Mais ne nous fâchons pas !

Parce qu’au fond, il nous raconte quoi ce film des bleus en mission en Angleterre ?

Si vous aimez le rugby ou le ton de ces brèves, lire la suite ici >>

Retrouvez la rubrique Brèves d’Ovalie chaque semaine (ou presque) pour revivre les grands moments de rugby  autrement, sous ma plume désinvolte et partisane.

Vous pouvez suivre les articles directement sur le blog dédié : mondialrugby2011.canalblog.com/

Les brèves du Café…

Pauvre Zorg !

« Il est sorti quand de l’hôpital ?
– Z’matin !
– Et t’es pas allée le chercher ?
– Ben non, z’travaille moi ! Et puis il avait qu’à pas faire le con avec zon vélo ! Zon pote Zohn il a un quat’ quat’, z’est plus facile pour zes béquilles et za zambe. En plus il zait conduire lui !

– Comment c’est arrivé ? »

Alors que Zozotte commence à raconter à Françoise la mésaventure de Zorg tout en essuyant les verres derrière le comptoir voilà que débarque le Pierrot tout fringuant, sautillant même, se frottant les mains gelées à l’idée d’un petit remontant qui réchaufferait l’intérieur.

« Salut les filles !
– Salut Pierrot !
– Bonzour Pierrot ! … Z’te sers un demi ?

– T’aurais pas un p’tit vin chaud plutôt ? Ses yeux pétillaient et son corps frétillait à l’avance du réconfort à venir après avoir bravé le froid glacial de son chantier.

– On n’a plus de cannelle, intervient Françoise. On en refera demain sûrement. Tu veux un chocolat chaud, un thé, une tisane à la place, s’amuse-t-elle à le provoquer ?
– Pouah ! … j’suis pas encore malade. Quoiqu’un grog… oh, non, j’aime pas le rhum ! Mets-moi une poire, tiens, pour commencer !

– Il a du se faire mal, reprend Françoise s’adressant à Zozotte.

– Ben il z’est pété l’oz de la cuizze, comment qu’il z’appelle dézà ?
– Ah, me demande pas à moi, j’ai toujours été nulle en anatomie.
– Bon ben, comme le tibia là, mais zur la cuizze.
– Le fémur, les filles ! On l’appelle le fémur, les dépanne alors Pierrot. Qui s’est cassé la binette si c’est pas trop indiscret ?
– Haan !
– Zorg ! Il y a trois zours, en vélo, sur une plaque de verglas. Y a pas idée à faire du vélo par un temps pareil… Mais Zorg il n’en fait qu’à za tête !
– Ah, ça me rappelle l’hiver 66 au col du Soulor, se lance Pierrot. Avec Robert on se préparait pour le championnat inter régional des Hautes-Pyrénées, j’avais une forme du tonnerre…
– Ca va Higgins, tu vas pas nous tenir la jambe avec tes souvenirs de guerre, l’arrête tout de suite Françoise.

– Tiens voilà de quoi t’aider à remonter le col du Soulor… On a du boulot avec Zozotte ! »

Elle lui pose sa poire sur le comptoir et entraîne sa collègue dans la salle. Pierrot hausse les épaules, bougonne brièvement avant de porter sa potion chauffante à la bouche.

« Il en a pour combien de temps à être immobiliséreprend Françoise ?
– Au moins deux mois. Après ils disent qu’il y a la rééducazion. Il est pas prêt de remonter zur zon enzin. Il peut faire une croix zur zon tour du Danemark !
– Le tour du Danemark ?
– Oui, z’est zon idée depuis trois mois. Il z’entraîne tous les zours pour partir un mois zet été avec Zohn et faire le tour de zon pays.
– Ah bon ? tu ne m’avais jamais dit !
– Tu parles. Za me rend dingue ! … Il parle que vélo depuis qu’il a eu zon diplôme d’inzénieur.

Au lieu de bozzer il veut déza prendre une année zympathique pour faire le tour du monde.

– Sabbatique, Zozotte !
– Z’est pareil, z’est la vie cool pendant que les z’autres bozzent ! Mais là, il va rezter à la maizon zans bouzer, za va lui faire les pieds !
– T’es dure avec lui dis-donc !
– Et lui alors ? Tu vas pas prendre za défenze tout de même ? Le zoir il parle que des zouzis de vélo. La nuit il dort pour être en forme le matin. Il z’lève à ziz heure pour faire zent kilomètres. Z’est pas une vie za pour moi. Z’avait pas tilté sur Meetic dans la rubrique des activités.

Faut faire vassement gaffe quand z’est écrit « pazzionné de zyclisme ».

Françoise sourit.
– Tu rigoles, poursuit Zozotte, mais moi z’ai plus de vie de femme. La dernière fois, z’était pour mon anniverzaire. Tu te zouviens de mes boucles d’oreilles ?
– Oui, elles t’allaient super bien.

– Et t’as pas tilté toi non plus. Mais z’est des roues de vélo ! 

Là, Françoise éclate de rire.
– Arrête, z’est pas drôle.
– Pardon, mais là j’ai eu une vision !
– Hein ?
– Non rien. Des roues de vélo ! … Elle rit à nouveau. Et… ha ha ! … il a un bon coup de pédale quand il monte sur toi ?
– Mais t’es bête ! s’offusque presque Zozotte.

Françoise rit de bon cœur, ce qui étonne toute l’assistance tellement c’est rare, et Tonio le premier, lui qui vient de rentrer dans le café les bras chargés de cartons de vins.

– Et ben, lâche-t-il depuis l’entrée, Françoise est de bonne humeur, ça nous promet une bonne journée ! 

– Haaaan ! »

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Les brèves du Café…

Table 7

Fernand n’a pas touché à son assiette.

« Z’est pas bon ?  s’étonne Zozotte qui a trouvé plutôt réussi ce pot au feu du chef.
Pardon Zozotte, s’excuse Fernand, je n’ai pas faim, je n’aurais pas du le commander.
– Z’est pas grave,
le rassure-t-elle en ramassant l’assiette et les couverts.
– Tu ne vas pas le jeter ? Sinon tu me le mets dans un Tupperware. Je l’emporterai chez moi. Je n’aime pas gaspiller.
– Z’est comme tu veux. Qu’ezz qui y a, za va pas ?
– Si, si ! …  … En fait non, je n’arrive à rien depuis trois jours. Pas une once d’inspiration.

– Z’est la panne quoi ! Z’est pas grave, za arrive tu zais, za va revenir ! »

– Ha, hahaha ! … T’entends ça, Tonio, l’inspiration de l’écrivain, elle bande plus… hahaha ! … hahaha ! »

Claude qui n’en manque pas une, un coude sur le comptoir et l’autre en levier pour déverser son calva dans le gosier déjà bien ardent, saute sur l’occasion.

« Ah za z’est fin ! »

Alors qu’elle file en cuisine avec le plat du jour à peine entamé, Tonio, à quelques mètres, derrière son comptoir y met son grain de sel. Il interpelle son client de la table 7 :

« T’as essayé de changer de place ?  lance-t-il d’une voix très audible.

– Pardon ?

Le patron s’approche de Fernand surpris.

– Ben ouais, la table 7, t’en as peut-être fait le tour.
– Je ne comprends pas, Tonio. Tu sais bien que j’affectionne cette place depuis toujours.
– Ouais je sais. Comme je sais que t’aimes la poêlée d’encornets et ici on ne t’en fait pas tous les jours, je me trompe ?
– Euh, non, mais…

Fernand ne voit pas où Tonio veut en venir avec son analogie. Quel est le rapport ? Tonio passe derrière lui, face au comptoir.

« Si tu te places à la une, à l’intérieur, qu’est-ce tu vois ?
– Je ne sais pas. C’est quelle table la une ?

– Moi, je vais te le dire.

– Tu vois le bar dans toute sa longueur, tu vois le profil des clients, côté gauche, peut-être le meilleur, peut-être le pire. De la table 4 tu devines le droit. Mais de la une tu peux voir le déhanché de Marie-Elisabeth quand elle passe avec les plats chauds, tu vois sa petite moue contrariée quand elle revient avec les assiettes vides. Et avec un peu de chance, tu peux la voir en direct se taper le lustre que je me refuse à retirer, salaud de patron que je suis, au lieu de te retourner, toujours après l’accident, alerté par le rire général.
– Heiiiin, z’est malin !
l’interrompt Zozotte en haussant les épaules, revenant sur la terrasse.

– Dis donc, t’es inspiré toi aujourd’hui, s’étonne Fernand qui retrouve soudain le sourire.

– Mais je le suis chaque jour, reprend Tonio comme un comédien son texte, avec aplomb et sa fierté d’auvergnat, derrière le comptoir, devant, à la terrasse ou même à la cave. Parce qu’un café c’est une scène de théâtre où on joue des pièces en continue dans tous ses recoins.
– Haha !
s’esclaffe le Claude. Et ici on est aux premières loges !
– Tiens par exemple, à la table 5, t’es face au tableau noir où Françoise s’amuse à noter ses citations, des phrases des clients, triées sur le volet, SES phrases, attention ! … c’est le tableau de madame et pas question d’y inscrire mes jeux de mots à deux balles et encore moins tes répliques salaces, Claude.

– Argh ! On est des incompris, lâche par dépit ce dernier.

– Alors le mec de la 5, chaque fois qu’il lève la tête, il lit ces phrases, entre chaque bouchée ou chaque gorgée, il les connaît par cœur, à force, elles lui rentrent dans la tête et ressortent avec d’autres mots qu’il ne soupçonnait même pas exister dans son imagination et qu’il ne prend même pas la peine de relever, trop fainéant pour demander une page blanche et un stylo. Il se fait son film sans rien dire, en avalant, une bouchée, une gorgée, puis une autre, en silence. Parfois, s’il est désinhibé, il m’appelle et me fait l’honneur de sa trouvaille. Parfois seulement. Parce qu’il est pudique souvent, le client de la 5. Et je ne te parle même pas de la 13, pile en face des toilettes. Faut les voir y entrer et en sortir soulagés de leurs petites contrariétés. Ils ne payent pas de mines, pour tes portraits justement ! »

Personne ne semblait pouvoir arrêter Tonio dans sa fougue verbale. Fernand était impressionné de le voir aussi volubile. C’était bien la première fois.

« Et ben mon vieux, je crois que la leçon a fait son effet.

Demain, je change de table ! »

Zozotte ne semble pas du même avis.

« Z’est n’importe quoi, Fernand. Tu vas pas croire zes zottizes ?
– Tu sais quoi, Zozotte ? Je crois que j’ai faim.
– Zans déc ? …

– Je veux bien que tu me réchauffes ce pot au feu. » 

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Trois briquets dans la nuit

« Salut Tonio !
– Salut Khalid ! Je te sers un demi ?
– Ouais, je vais le boire avec mon ami, en terrasse…
– Fernaaando Torres ! beugle-t-il en s’approchant de la table 7 où se tient Fernand, la tête dans ses écrits.

– Alors, on ne dit pas bonjour à son pote Khalid ? »

Se retournant, surpris, Fernand esquisse un sourire et serre la main tendue par son ami, ou plutôt son collègue de bureau, pour peu que l’on puisse considérer le café comme leur lieu de travail.

Depuis deux mois que Khalid cherche un boulot, il a élu domicile au Café de la Page blanche, comme pour se donner bonne conscience, penché sur une feuille blanche, un stylo dans une main, sa bière dans l’autre, tantôt planchant sur une lettre de motivation, tantôt sur son CV. Très vite en levant la tête, il avait repéré Fernand avec qui il ne tarda pas à se prendre d’amitié et dont la faculté à faire des belles phrases le ravit immédiatement.

Fernand l’appréciait aussi, pour son bagout, son aisance à se lier avec les gens. Il pensait déjà à lui pour un personnage dans ses essais qui n’en finissaient pas de s’essayer et de ne jamais voir le jour. Tout n’était que brouillon pour l’instant, rabâchait-il souvent à Zozotte qui s’impatientait que son livre soit édité pour trouver dans une librairie une part de gloire à travers son propre personnage.

« Bonjour Khalid ! Ca me fait plaisir de te voir.
– Alors t’avances bien ? … fais-voir ! … je peux ? …

Le milieu ambiant est l’âme des choses. Whahou ! … Chaque chose possède une expression propre, et cette expression lui vient du dehors.

– Et bé ! … C’est chiadé !
– Merci, c’est juste un brouillon pour l’instant…
– Hé ! Tu sais quoi, j’ai pécho l’autre jour grâce à ton livre.
– Lequel ?
– Prévert. Comment c’est le titre déjà ? … Ma parole !
– Ah, celui-là ! … Paroles. Tu as aimé ?

– Ouais, j’adore. On peut faire une pause à chaque page. Cool ! C’est court, c’est nickel pour moi. En plus  y a des passages, c’est trop de la balle !
– Ah oui ?

– Justement l’autre jour, j’sortais avec une bourgeoise du 8ème, je l’ai bluffée. Tu vas pas m’croire, écoute. Elle me sort texto au p’tit matin: « on est quel jour ? ». Z’y va que je lui réponds direct : « on est tous les jours mon amie, on est tous les jours mon amour ».

Et là, elle a kiffé grave, j’te jure. C’est trop fort Prévert ! »

Fernand sourit, loin de penser que la prose de Prévert puisse être un outil de drague efficace.

« Et tu utilises souvent les vers de Prévert pour… séduire ?
– Y en a un qui marche à tous les coups, c’est c’ui des briquets, là !
– Des briquets ?
– Ah, comment ça fait déjà ? … Ah, oui ! … j’allume trois briquets dans la nuit, le premier pour voir ton visage, le second pour voir tes yeux, le troisième pour voir ta bouche et là, et là… écoute, écoute… Et l’obscurité toute entière pour me rappeler tout ça en te serrant dans mes bras. Trop fort j’te dis !
– Il s’agit d’allumettes il me semble.

– Ouais mais ça marche aussi avec des briquets »

Fernand ne peut s’empêcher d’éclater de rire gentiment.

« Pourquoi tu ris ?
– Oh, rien… c’est ta façon de le raconter, on dirait une charade ! »

Et Fernand rit à nouveau plus généreusement.

« Oui, mais je m’applique t’inquiète ! … Merci en tout cas, c’est trop bien comme bouquin.
– T’en as d’autres des comme ça, de lui ?
– Tu veux que je t’en fasse une liste à la Prévert ? s’amuse à lui proposer Fernand.
– Ouais, ouais que de Prévert. L’autre jour tu m’as fait lire du Beaudelaire, c’est trop triste ! »

Tonio dépose alors le demi sur la table des amateurs de poésie et interpelle Khalid sur leur sujet fétiche.

« T’as vu le carton rouge de Zlatan samedi ? … On est mal, on est mal !
– Trop la classe son geste de kick boxing… Tout ce qu’il fait c’est la classe ! »

A ce moment-là, Françoise entre dans le café : « Pff … ça parle encore football ! »
Khalid s’offusque alors :
« Et z’y va, elle, on parle de Prévert depuis un quart d’heure !
– Laisse tomber, le reprend Tonio, ça fait une semaine qu’elle est de mauvaise humeur, tout ça parce qu’elle n’a personne à son atelier d’écriture pour retraités. Chut, la r’voilà !
– Vous connaissez Prévert, Madame Françoise ?
– Hein ?

– L’histoire des briquets. C’est un mec, il allume trois briquets dans la nuit.
Il s’arrête et se reprend :

– Ca marche aussi avec des allumettes ! » 

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Les brèves du Café…

Brève au comptoir

« C’est comme ça et puis c’est tout ! conclut Tonio. Et d’ajouter :
– C’est encore moi le patron que je sache !
– Rrrhan ! ».

Françoise rageait à l’intérieur. Elle trouvait l’idée ringarde et le faisait savoir à son patron… à sa façon. Le vieux n’aurait jamais laissé passer ça. Le Café de la Page blanche associé à la « beauferie » des idées de ce type.

« Pff … ».

Elle repassa derrière le comptoir sans regarder son interlocuteur.

« Oh, tu peux pouffer à défaut de faire des phrases. Elle est belle la discussion ! » reprit Tonio.
– Ben z’est vrai que z’a pas été trop le ztyle de la maizon… » crut bon d’intervenir Zozotte.
Toi, ressers donc un coup à Pierrot, tu vois bien qu’il est à marée basse au lieu de te mêler d’affaires qui ne te regardent pas ».

Tonio enchaîna, prenant Pierrot à témoin.

« C’est vrai quoi, j’vois pas où est le problème. Ce tableau noir, il est pratiquement vide depuis qu’on a rouvert il y a six mois. Qu’est-ce t’en penses toi ?
– Ah, moi j’trouve que c’est une idée géniale. Ça nous évitera d’aller chez les rosbifs samedi prochain !
acquiesça le plus fidèle des clients du patron.
– Haaaan, gros malins !  lâcha Françoise dans sa plus longue phrase de cette discussion qui durait depuis une heure déjà.

– C’est quoi ces han de… p… porteuses d’eau ? s’agaça Tonio, cherchant ses mots. T’es fatiguée ? .. Euh… mets moins d’eau dans le pichet si c’est trop lourd ! »

Il esquissa un sourire quand Françoise baissa la tête et attrapa deux assiettes qu’elle claqua brusquement dans l’évier. L’eau du robinet s’écrasait dessus à haute pression. Ainsi exprimait-elle sa colère dans une symphonie de fracas de vaisselle.

« Haha ! … Des han de porteuse d’eau, haha ! C’est bon, ça ! s’esclaffa Pierrot.
– Heiin ! … Z’est pas de vous, za ! » osa se mêler à nouveau Zozotte tout en servant sans regarder un deuxième whisky au client privilégié du patron.
– Stooop ! hurla Tonio qui voyait son alcool dix ans d’âge partir gratuitement. On voit que c’est pas toi qui le paye.
– Merci Zozotte ! Les yeux de Pierrot pétillaient devant une telle rasade.
– Et après ?
s’insurgea Tonio, c’est interdit de s’en servir pour faire un bon mot. Moi aussi j’ai lu Molière !
– C’est De Rostand,
le reprit Pierrot en aspirant du bout des lèvres le trop plein de son alcool à la limite de déborder du verre.
– De Roustand ? … heiin ? … Je l’ai jamais entendu dire ça et pourtant je le suis depuis Téléfoot, je suis fan de son blog dans l’Equipe.
– Mais non, j’te parle d’Edmond De Rostand, Cyrano de Bergerac. Et l’autre hé… Roustand haha !!
– Ah ben oui, c’est dans ce film même qu’il y a la fameuse réplique… euh.. c’est un pif, c’est un cap…
Il moulina ses gestes de sa main droite pour poursuivre avec un ton théâtral. Oh, que dis-je c’est un cap, c’est… euh… c’est une euh… insule ! »

Puis il se reprit, gêné :

« Euh, bon.. je sais plus trop mais… mort de rire ! » Et il rit.

Voilà que Fernand fit son apparition. Onze heures deux minutes. Une vraie horloge ce Fernand.

« Bonjour !
– Bonjour !
– Salut !
– Oh ! Bonzour m’zieur Fernand !
– Ah, je vois que Françoise n’est pas dans un bon jour,
lâcha le poète tout en lui adressant un sourire.
– Bonjour Fernand. Je suis juste un peu énervée, là !
– Ben oui, le bozz veut nous mettre un écran zéant devant le tableau pour zuivre les matss de rugby,
intervint spontanément Zozotte.
– Ouais et alors, poursuivit Tonio, j’vois pas où est le problème. Faut qu’il y en ait pour tout le monde ici.
– Pourquoi pas ? C’est une bonne idée, dit Fernand en se tournant vers Françoise.
– Pff !

– Madame trouve que ça fait pas assez littéraire pour l’endroit.

– Ben oui, z’est pas l’ztyle de la maizon…
– Moi j’aime bien le rugby même si je ne comprends pas tout,
ajouta Fernand. Et puis, c’est une matière à écrire comme une autre. Ca peut donner l’occasion de s’initier à une chronique sur les résultats des matchs, non ?
– Voilà, Fernand nous fait la chronique et on l’affiche en vitrine le lundi,
conclut Tonio, fier d’avoir gagné son bras de fer avec Françoise. Il a horreur quand ils se font la tête, ça peut durer très longtemps.
– Ah, mais je n’ai pas dit que ce serait moi le chroniqueur sportif. J’en suis bien incapable, alerta tout de suite Fernand.
– Mais qui alors ? demanda Tonio
– Toi ! Je suis sûr que tu as la verve pour nous concocter des petites brèves hebdo sur le sujet.
– Moi ? Tonio rougissait sans s’en rendre compte.
– Lui ?
s’étouffa Zozotte incrédule.
– Pff !
– Mais oui ! confirma
Pierrot déjà à sec depuis cinq minutes qu’il écoutait ses amis débattre. Ca s’arrose, non ?
– C’est la tournée du patron »
le rassura Tonio.

Une phrase qui sonnait comme un Alléluia dans les oreilles des quelques acolytes accoudés au comptoir.

Ainsi naquirent les brèves d’Ovalie ce matin-là, au comptoir du Café de la Page blanche.

Vous voulez la suite ? … cela ne dépend que de nous  !

Le décor est planté ! La rubrique Brèves du Café nous attend pour animer ce petit monde selon notre imagination et notre culture sitcom, série télé ou scène de théâtre !

Et n’oubliez pas, les Brèves d’Ovalie se mettent à jour chaque week-end… ou presque !

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Le rendez-vous hebdo…

Retrouvez chaque week-end

  • le petit jeu d’écriture créative de Pascal Perrat,

  • les brèves d’Ovalie d’Antonio

à emporter dans le train, pour s’aérer l’esprit, ça change du « 20 minutes »! 

Le Café de la Page blanche met à jour ses liens vers leurs blogs, chaque lundi…
Facile à trouver, c’est fléché !

 

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Les brèves du Café…

L’émotion des idées

Tonio, jean, surtout pas délavé, chemise en dedans, faisant ressortir ce ventre rond, désastre d’une vie derrière le comptoir à enquiller les demis, un pour toi, un pour moi, lui qui était affûté à l’âge de dix-huit ans, numéro dix et capitaine de la Séléccào de la porte de Vanves dans le championnat de football du dimanche matin avant d’entrer dans la vie professionnelle tracée par son père qui tenait le bar-restaurant Lusitanos de la rue Didot, Tonio et ses multiples clefs accrochées à la ceinture, débarquait au café, à 10h30, comme chaque matin quand Zozotte passait l’aspirateur dans un boucan infernal, chantant à tuer toutes les têtes avec des oreilles encore en état d’ouïr.

« Bonjour Marie-Elisabeth ! » s’amusait-il à saluer ainsi chaque matin, Zozotte.

Aucune réponse ne semblait venir du mètre quatre-vingt quatre qui s’employait à astiquer, le nez sur la moquette et le derrière en trompette.

Peu importe, le patron s’installa à une table après s’être servi une noisette noyée de lait, comme Françoise appelait son café du matin. Car à chaque fois il versait tout le pot de lait jusqu’à ras bord dans son expresso, servi dans une grande tasse, toujours.

Le vacarme de l’aspirateur cessa. Une voix nasillarde se fit entendre dans le fond avec éclat : « Bonzour patron ! »

Un hochement de tête à peine détournée d’un bout de papier sur la table la salua à nouveau, avec un bonjour inaudible entre les dents.

« Depuis quand qu’vous z’écrivez patron ?

– Mais depuis que j’tiens ce café ! » répond sèchement Tonio agacé que la plume ici dans son propre café soit dressée en éloges sur les têtes pensantes des autres quand pour lui elle est tout juste plantée dans le trou du cul de sa culture.

Tonio n’était pas si inculte, il avait son humour et il n’avait honte de rien, deux qualités qui l’ont toujours fait avancer, reconnaissaient ses proches.

« Mais vous z’écrivez quoi ?
– Tiens, lis ça et dis moi ce que tu comprends ! »

Il lui tendit la feuille noircie à l’encre bleue qui interpella aussitôt Zozotte.

« Ben, on dirait l’écriture de Fernand. Vous z’écrivez comme… »

Elle s’interrompit comprenant que ce ne pouvait être que l’écriture de Fernand.

« Lis ! »

Elle lut à voix haute :

« Vivre une vie cultivée et zans pazzion, au zouffle caprizieux des z’idées, en lizant, en rêvant, en zonzeant à écrire…
– Continue !
– … une vie zuffizamment lente pour êt’ touzours au bord de l’ennui, suffizamment réfléssie pour n’y tomber zamais.
– Continue, continue !

– Vivre zette vie loin des z’émotions et des penzées, avec zeulement l’idée des z’émozions, et l’émozion des z’idées.

– C’est quoi ça, l’émotion des idées, hein ? »

Zozotte resta interloquée ne sachant vraiment quoi répondre.

« Et bien moi j’dis que j’aime mieux être à ma place, ajouta Tonio. Il m’a l’air bien perturbé notre ami.
Mais z’est beau, z’est bien écrit, lâcha-t-elle, à court d’autres arguments.
– C’est beau, soit. C’est de la poésie. On peut aligner des mots sans qu’on soit obligé de comprendre, c’est ça ? renchérit-il.
– Ze zais pas, balbutia à nouveau la serveuse, embêtée. Des vois on peut pas tout comprendre dans les livres. Z’ai pas fait azzez d’études pour… 
– C’est ça, l’interrompit Tonio, c’est des mots pour intellectuels qui se comprennent entre eux. Moi je préfère encore les blagues de Bigard à ce charabia. Au moins je sais pourquoi j’rigole !
– Pff ! »

Zozotte haussa les épaules, convaincue que son Fernand était un grand écrivain et que s’il avait écrit cela, c’est que ça voulait dire bien plus encore que les mots dont elles connaissaient le sens dans le dictionnaire mais bien moins une fois assemblés entre eux.

Justement, Fernand arrivait comme chaque lundi matin, vers 11h.

« Bonjour !
– Bonjour !
– Bonzour Fernand !
– Tiens t’as laissé ça sous la table hier soir. Désolé si c’est un peu froissé.
– Oh, merci beaucoup Tonio. Je le cherchais justement ce matin. Ca m’fait un souci de moins.
– A nous aussi, répond Tonio, à nous aussi !
– Pff ! »

Zozotte haussa à nouveau les épaules quand son patron disparut derrière le comptoir.

« Qu’est-ce qu’il a voulu dire, Zozotte ? demanda Fernand interloqué.
– Oh, rien, il est zaloux, z’est tout ! »

Après un moment d’hésitation, Zozotte ajouta :

« Dis Fernand, za veut dire quoi l’émozion des z’idées ? »

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Le bon, la brute et le truand !

Les brèves d’Ovalie

Le top 14 a repris depuis une semaine et déjà les stars sont à l’affiche !

Les trois prétendants au Brennus, sur le podium la saison passée, crèvent à nouveau l’écran du championnat de France dans une nouvelle réalisation spaghetti à la Sergio Leone où l’an passé l’individualisme et l’anarchie en ont été trop souvent les piliers, talonnés par l’enjeu, laissant le jeu quelque part dans les lignes arrière.

Les trois prétendants au titre de champion, héros incontournables de ce nouveau long métrage produit par la LNR, ont endossé les rôles principaux, comme l’année dernière.

Toulouse, le bon, celui qui produit le beau jeu, sans forcer, sans en rajouter hors des terrains, celui qui dégaine au bon moment et qui gagne toujours à la fin.
Clermont, la brute (ou l’abruti selon), celui qui tue sans pitié, le rouleau-compresseur en attaque mais qui sait aussi se laisser avoir bêtement, de cartons pleins en cartons jaunes, de fautes de mains en faute de points, le dindon de la farce, au final.
Toulon, le truand, celui qui commet des fautes sans se faire p(r)endre, celui qui parle trop et qui se voit infliger une traversée du désert, payante, de connivence avec le bon, en rouge et noir lui aussi, ils se partagent le butin final dont la gloire revient toujours au même.

Voilà donc à nouveau les trois personnages de ce TOP14, les armes en mains, en quête du graal, enterré quelque part dans le cimetière des phases finales, cimetière car l’an passé, le rugby y semblait mort et enterré à tel point que le blondin toulousain n’eut qu’à déterrer l’or de son 19ème Brennus.

Qu’en sera-t-il cette saison ?

Pas dit que ce TOP 14 nous rejoue le même film tant s’invitent à l’écran Biarritz et Bayonne dans un tout autre scénario de « Il était une fois dans le sud-ouest », dont le rugby habillé l’an dernier par des cache-poussières, ou des cache-misères parfois, semble aujourd’hui mieux armé et prêt à jouer, non de l’harmonica, mais une partition de haut vol qui pourrait bien mettre les deux formations basques sur les bon rails d’un chemin de faire bien mieux pour ne pas sombrer cette fois.

Et ça commence plutôt pas mal pour elles !

Quant à Paris, Racing Métro, Castres et Montpellier, ils ne se laisseront pas conter un western aussi facilement et affichent déjà dans la production des deux premières journées un tout autre genre.

Et s’il était une fois l’Amérique, pour ces protagonistes aux phases finales ?

Par contre pour Grenoble, Bordeaux, Agen, Perpignan et Mont-de-Marsan il faudra se battre jusqu’au bout pour survivre au milieu de l’élite, dans un bien long métrage aux airs d’un « Il était une fois la révolution », au moins.

Retrouvez la rubrique Brèves d’Ovalie chaque semaine (ou presque) pour revivre les grands moments de rugby  autrement, sous ma plume désinvolte et partisane.

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Les brèves du Café…

Le vieux

Le Tonio est un de ces patrons auvergnats qui achètent tous les fonds de commerce parisiens qui se libèrent. Il n’y a pas de limite à faire des affaires. Et en bon auvergnat, il n’y a pas de limite à faire des économies. Pas question de revoir la déco ou encore de changer l’enseigne.

« On est là pour vendre des consommations, pas pour se la jouer dans un décor de cinéma ! »

Et tant mieux, parce que Françoise, elle n’aurait pas supporté. Le Café de la Page blanche, c’est l’idée du Vieux comme il se faisait appeler avant qu’il ne vende l’affaire sans que personne n’en connaisse la raison. Pas même Françoise.

Seuls Fernand et elle l’ont côtoyé. Françoise a fait ses débuts avec, il y a dix ans, il lui a appris le métier et bien plus.

« I z’ont coussé enzemble ?
– Je ne crois pas, Zozotte. Et après, ça changerait quoi ? En tout cas, elle avait le sourire, c’est sûr ! »

Fernand était le plus fidèle des clients. Il trouvait dans ce café une inspiration qu’il ne s’expliquait pas. Le Vieux lui avait insufflé l’envie d’écrire.

« Ca a été une vraie révélation.

– Ah ouais ?
– La première fois que j’ai eu une feuille blanche entre les mains, je ne voyais rien. Et puis il est venu vers moi. Il s’est assis.
– Et après ?
– Il m’a demandé pourquoi je n’écrivais rien. Je lui ai répondu que je n’avais rien à raconter sans doute, que l’écriture et moi, ça faisait deux.
– Et alors ?
– Il m’a rétorqué : « et alors, tu n’aimes pas être à deux ? ». Sur le coup j’ai pas compris. Et puis il a tourné la feuille vers lui et s’est mis à lui parler : « Excusez-le, c’est un rustre, il ne sait pas parler aux demoiselles, une belle page blanche comme vous, immaculée avec ce joli petit liseré bleu, pas une tâche, ni de gras, ni de vin, alors que lui… Regarde ta chemise ! Tu aurais pu changer de chemise avant de la sortir ! ». Il a continué ainsi pendant dix bonnes minutes. Il parlait bien, je souriais, je me prenais à son jeu. Jusqu’au moment où il s’est levé…

– Et alors, et alors ?

– Il a remis la feuille bien droite devant moi et s’est excusé : « Je vous laisse, j’ai du travail. Vous avez sans doute plein de choses à vous dire ». Et il m’a fait un clin d’œil avant de retourner en cuisine.
– Et qu’ez’ t’as fait ?
– J’ai écris comme jamais je n’avais écrit, à cette femme-feuille, la première de mon existence. Je l’ai gardée chez moi. Puis chaque jour qui a suivi, j’ai entrepris une correspondance avec elle avant de passer à d’autres sujets. J’avais plein d’idées en moi que je ne soupçonnais pas. C’était fabuleux.
– Whoua ! C’est beau ! … Tu me feras lire zet’ correzpondanze, dis ?
– Peut-être, je ne sais pas. Le plus dingue, c’est que je n’arrive pas à écrire ailleurs qu’ici. C’est comme si j’avais besoin de sentir sa présence. Pour moi, il n’est pas parti. En tout cas son souffle, l’inspiration quoi, ne m‘a pas quitté. Il est resté dans ce lieu, intact. Je le sens presque physiquement. Et pour ça, je peux remercier Tonio.

– Ah mais lui, il zait écrire que des addizions et te zouffler dans les bransses quand tu vas pas azzez vite…

– Les bronches, Zozotte, on dit souffler dans les bronches.
– Z’est pas z’que z’ai dit ? Qu’ez’ te zers ze matin, une noizette ?
– Parfait ! … avec une tartine s’il te plaît. »

Vous voulez la suite ? … cela ne dépend que de nous  !

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