Mathilde se remarie ! Épisode 8 / 15
Revenir à l’épisode précédent >>
Mathilde, 29 ans, mariée, fidèle, rêve toujours de prince charmant, de robe de princesse, nostalgique du plus beau jour de sa vie, dix ans déjà !
Sandrine, meilleure amie de Mathilde, 33 ans, l’âge du Christ, mais rien à foutre, pas croyante, le mariage, très peu pour elle, célibataire, hédoniste de nature, aime faire la fête, danser, boire un p’tit coup, ou deux, et transgresser les codes dès qu’elle peut.
Catherine, Cathy pour les intimes, collègue de Mathilde, 38 ans et toujours célibataire, à fond sur Meetic, rêve de mariage en grand avec une robe blanche, elle y croit !
Lætitia, chef de Mathilde, 45 ans, divorcée, deux enfants, terminé pour elle les mecs qui ne s’assument pas et jouer leur mère au foyer, elle veut voyager et s’éclater, profiter de la vie, quoi !
Joëlle, mère de Mathilde, 57 ans, veuve depuis cinq ans, elle a fait son deuil, mais les hommes, le mariage, c’est de l’histoire ancienne.
Une heure plus tard, on sonne.
Cathy sursaute, comme si la police était à la porte. Sandrine prend les choses en mains, comme depuis le début de cette sale histoire.
— Bougez pas, je vais voir ! C’est sûrement Lætitia.
Effectivement, c’est bien elle, mais elle n’est pas venue seule, à sa grande surprise.
— Ben quoi ? Elle était avec moi, j’allais pas lui dire… Enfin, il s’agit de sa fille !
— Oui, bien sûr. Bonsoir Joëlle, heu… attendez-moi là, juste un instant, je reviens.
— Qu’est-ce qui se passe ici à la fin ? s’impatiente la mère qui flaire le drame.
Sandrine retourne dans le salon, histoire de préparer la fille à la venue de sa mère. Seulement, les deux invitées ne lui en laissent pas le temps, elles l’ont suivie.
— Maman ? appelle Mathilde, après avoir cru reconnaître la voix maternelle.
Joëlle entre la première et se jette dans les bras de sa fille, toute heureuse de la savoir saine et sauve.
— Ma chérie ! Tout vas bien ?
— Oui oui, maman !
Lætitia découvre la première le carnage, le sang sur le tapis et la silhouette d’un corps recouvert d’un drap.
— Nom d’un chien, mais qu’est-ce qui s’est passé ?
Joëlle pousse un cri d’effroi en heurtant le corps à ses pieds. Elle vacille. Sandrine la rattrape in-extrémis et la fait s’asseoir sur le canapé.
— Assieds-toi aussi, Lætitia ! Je vais tout vous expliquer.
Dix minutes plus tard. Mathilde est en sanglots dans les bras de sa mère, comme une petite fille qui vient de faire une énorme bêtise.
— Pardon ! Maman, j’voulais pas. Ça a été horrible… hanc ! Pardon !
Joëlle est au bord des larmes également. Elle tente de trouver les mots pour réconforter sa fille, murmurant d’une voix à peine audible.
— Ma fille… Mon bébé ! … Ce n’est pas de ta faute… Comment est-ce encore possible ? Nous sommes maudites avec les hommes !
Lætitia presse l’épaule de Joëlle dans un geste de compassion, retenant toute émotion. C’est qu’il s’agit désormais d’avoir les idées claires.
— Bon bon… Ne paniquons pas ! … On se calme, les filles ! … Pas de panique, on va s’en sortir ! PAS-DE-PANIQUE !! … … laissez-moi réfléchir !
Et quand Lætitia réfléchit, rien n’est laissé au hasard. Elle n’était pas la chef pour rien, au bureau. Ça dépotait avec elle. Et ça n’a pas tardé, trois minutes plus tard.
— Dans le sac poubelle, là, je veux tout ce qui a touché de près ou de loin à la victime.
Ses fringues, la robe, les serpillères, le tapis !
Oui oui, ta culotte aussi Mathilde ! Prend une douche et va te changer !
Non, le pistolet, je vais le prendre dans mon sac pour l’instant.
Hop hop hop, malheureuse, donne-moi son portable ! Une aubaine !
Laisse-moi faire, on verra plus tard !
Ses papiers aussi, son blouson. On va pas le laisser sortir à poil.
Tu connais son code de carte bleue ?
T’es un génie, Mathilde ! J’suis bête, t’es juste sa femme !
— C’est quoi ton plan au juste Lætitia ? s’intéresse de près Sandrine.
— Il faut arriver à le faire vivre encore un peu, mais loin d’ici. Tu me suis ?
— Pas complètement, mais tu vas me dire.
— Comme dans Volver ! s’exclame soudain Cathy.
— Hein ? ne comprend pas Lætitia.
— Mais on n’a pas de congélateur assez grand.
— T’es lourde, Cath’, avec ton congèl’ !
Lætitia continue de dérouler sa stratégie .
— On va utiliser son fauteuil de bureau roulant pour l’emmener jusqu’à la voiture. Dans une heure, on décolle. Il faut que la maison soit aussi nickel que d’habitude.
— Ce serait bien la première fois, fait remarquer Joëlle.
— Pourquoi tu dis ça, maman ?
— Ne le prends pas mal, ma chérie. Mais le ménage et toi, on ne peut pas dire que c’est le grand amour.
Mathilde se remet à pleurer.
— Ah non ! l’interrompt Lætitia, ça suffit ! Tu ne vas pas remettre ça. Maintenant tu vas être une grande fille ! Tiens, va remettre un peu de ton bordel dans ta chambre, qu’on n’ait pas l’impression que tu viens d’emménager.
— Hanc ! Oui…
— Ensuite, prends une douche et change-toi ! … Et ta robe, à la poubelle, n’oublie pas ! Cathy, aide-la, si tu veux bien. Et ramène-nous un costume de monsieur, là. Un chapeau et ses lunettes de soleil aussi.
— Pour quoi faire ? demande curieusement Cathy.
— Pour qu’il soit présentable, au cas où.
— Han !
— Je ne pige pas tout, dit Sandrine, mais pourvu qu’on déguerpisse d’ici au plus vite.
Une heure trente plus tard.
— Les filles, discrètement, on emmène le corps dans le fauteuil jusqu’à la voiture.
Appelez l’ascenseur !
Cathy, Joëlle, les sacs, dans le local poubelle !
Sandrine, aide-moi à pousser le fauteuil, l’ascenseur est là.
Mathilde, attends-moi je reviens avec le chariot.
« 3h17 » s’affiche sur le tableau de bord du 4×4. Le silence dans la rue est total. Un tour de clé de contact et le ronflement du moteur diesel le brise comme un éclat sur le pare-brise. Un frisson parcourt les filles.
— Allez, on met les voiles !
— J’ai froid, se plaint Mathilde. Tu ne veux pas relever la vitre, s’il te plaît ?
— Non, réplique le chauffeur. Fais comme moi… RESPIRE !
— On va où ? ose demander Cathy.