Opération Lolita

Mathilde se remarie !                                 Épisode 11  / 15

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Mathilde, 29 ans, mariée, fidèle, rêve toujours de prince charmant, de robe de princesse, nostalgique du plus beau jour de sa vie, dix ans déjà !
Sandrine, meilleure amie de Mathilde, 33 ans, l’âge du Christ, mais rien à foutre, pas croyante, le mariage, très peu pour elle, célibataire, hédoniste de nature, aime faire la fête, danser, boire un p’tit coup, ou deux, et transgresser les codes dès qu’elle peut.
Catherine, Cathy pour les intimes, collègue de Mathilde, 38 ans et toujours célibataire, à fond sur Meetic, rêve de mariage en grand avec une robe blanche, elle y croit !
Lætitia, chef de Mathilde, 45 ans, divorcée, deux enfants, terminé pour elle les mecs qui ne s’assument pas et jouer leur mère au foyer, elle veut voyager et s’éclater, profiter de la vie, quoi !
Joëlle, mère de Mathilde, 57 ans, veuve depuis cinq ans, elle a fait son deuil, mais les hommes, le mariage, c’est de l’histoire ancienne.

Les bras chargés comme un jour de soldes…

Lætitia et Cathy retrouvent les autres filles dans une chambre d’hôtel luxueuse. Joëlle leur ouvre la porte.

— Les filles se sont endormies, leur chuchote-t-elle.
— Vous avez pu prendre une douche ? demande Lætitia en lâchant tous ses sacs.
— Oui, soupire Joëlle de soulagement. Ça fait du bien.
— Je ne rêve que de ça depuis qu’on a mis enfin les pieds dans cette ville, s’exclame la chef.
— Pareil ! lâche Cathy en même temps que ses courses. Les rues de Milan auront fini de m’achever. Je peux aller la prendre la première ?
— Oui, bien sûr, répond Lætitia. Mais ne traîne pas !
— Promis.

Cathy prend quelques affaires et s’enferme dans la salle de bains. Lætitia tombe dans les bras de Joëlle et craque nerveusement pour la première fois.

— Dans quel pétrin on s’est fourrées. Je ne suis pas sûre qu’on arrive à s’en sortir, Jo.
— On a fait au mieux. Tu as été formidable jusque-là, Lætitia… On compte toutes sur toi. Tu es épuisée, une bonne nuit te fera du bien.
— Oui, sans doute. Il reste encore de la route. Mais une fois à Venise, on pourra se reposer.

À cet instant, Sandrine se relève du grand lit, entendant la conversation des filles.

— Vous êtes revenues ?
— Oui, répond Lætitia, retrouvant son caractère de meneuse. Je nous ai pris des petites tenues pour notre arrivée à Venise. Celle de Cathy est éblouissante.

Notre Paul va en tomber à la renverse.

— Paul ? ne semble pas suivre Sandrine, dans le potage après sa mini sieste.
— Je veux dire celle qui jouera le rôle de Paul, bien sûr.
— Et qui est l’heureuse élue ?
— Et bien, toi, Sandrine. C’est le rôle dont tu as toujours rêvé, non ? Le mari qui trompe sa femme à Venise avec une pétasse à qui il a acheté une robe aux couleurs pétantes à Milan pour se l’’envoyer en l’air à Venise. La classe à la mode masculine, quoi !
— Et pourquoi pas toi ? rétorque l’intéressée. Tu m’as l’air bien plus préparée, avec tes cours de théâtre.
— Sérieusement, Sandrine, tu m’as bien vue, là ? Parmi nous, personne n’est en dessous du bonnet C. Sans vouloir t’offenser…
— Quoi, sans vouloir m’offenser ?
— Écoute ma chérie, appelons un chat un chat. T’as plutôt pas beaucoup de poitrine.
— C’est pas parce que j’ai pas des obus de première guerre mondiale que j’ai pas de poitrine. Faut pas déconner là !

À cet instant, Cathy sort de la salle de bain, les seins enroulés dans une serviette, visiblement pas totalement recouverts.

— Ne te vexes pas, Sandrine, tempère Joëlle. Ce n’est pas le sujet. Tu comprends bien que pour le rôle d’un homme, tu es la mieux placée.
— Des petits seins, c’est bien aussi, s’en mêle Cathy. Je connais un mec…

— Évidemment, si « Bonnet M » reprend le refrain, j’ai plus qu’à chanter du Birkin, moi !

— Oh lala ! Tu ne vas pas nous faire un complexe à trente piges, dédramatise Lætitia.
— OK OK ! C’est bon, j’ai pigé. Il est où le costume du gros con ?
— S’il te plaît, Sandrine, s’offusque Joëlle, un peu de respect, on vient à peine de l’enterrer.
— Tu vas voir comment je vais te mettre, ma petite Cath’, s’amuse le futur acteur, d’une voix grave et courant après sa proie qui en perd sa serviette. Si t’as jamais vu les étoiles, avec moi tu vas faire le tour des galaxies.
— Mais euh ! Arrête Sandrine !

Les deux filles se chamaillent sur le lit. Cathy, complètement nue, n’est pas rassurée après ce que lui a dit Mathilde.

— Arrête, je te dis, je ne trouve pas ça drôle. Laisse-moi m’habiller.
— T’inquiète, j’attendrai mon heure, ma chérie, continue Sandrine de sa voix masculine.
— Bon, je vais prendre un bain, moi, annonce Lætitia, histoire de me relaxer avant de reprendre le volant. On décolle dans une heure… Jo, j’aurais besoin de tes talents de kiné, si tu veux bien, ajoute-t-elle, s’étirant la nuque. Là, je suis complètement nouée.
— Oui, bien sûr, répond Joëlle. Il nous reste combien d’heures de route ?
— Quatre, tout au plus, je dirais. On devrait arriver avant 22 heures. J’espère !

La porte de la salle de bains se ferme. Sandrine étale le costume sur un pan du lit quand Cathy déballe la robe de femme fatale. Sandrine est conquise.

— Wouahou ! Mais vous l’avez dénichée où ?
— Dans une des boutiques les moins chères à Milan ? On l’a eu pour mille euros, et encore, avec la ristourne.
— Hein ? J’espère que Paul n’entend pas sinon il se retournerait dans son terrain vague.

Mathilde sort de la pièce voisine et voit Cathy enfiler une splendide robe, rouge pimpant.

— Qu’est-ce que c’est ?

— Une robe cocktail, qu’elle a dit la vendeuse.  C’est sobre pour l’Italie.

— Ça fait pas un peu… ?
— Lolita ? Carrément ! J’adore ! s’exclame Sandrine qui s’approche de nouveau avec vigueur et sa voix grave de la belle. Oh ! toi, tu vas me rendre fou, bébé !
— Arrê-teu ! T’es pas drôle !
— Où est ma mère ? J’ai un mal de crâne !
— Dans le spa, à côté, répond Sandrine. Elle prodigue un massage à notre pilote avant de reprendre le rallye.
— Elle a toujours des comprimés miracle dans son sac.

Mathilde se dirige jusqu’à la salle de bains. Elle frappe un coup à la porte tout en l’ouvrant. Elle la referme aussitôt, comme si elle avait vu Paul, et se précipite sur le lit et s’y s’écroule en pleurant. Cela faisait longtemps, semblent se dire, de concert, les regards des témoins. Joëlle sort de la salle hantée, confuse.

— Ma chérie, je vais t’expliquer !


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La fête des mots…

Au Café de la Page blanche, le 21 juin, ce sont des mots que l’on joue dans la rue.

Moi je joue de la plume.   Plume

J’adore ! … parcourir la rue de la Page blanche et rejoindre tous ces groupes délurés et jouer des mots ensemble. Je me souviens, l’an dernier, il y en avait un qui jouait du crayon de papier.

Whouah ! … quel son sur sa gratte !

Un peu gras pour certains, mais quelle impro ! … Avant que ce mixeur à la gomme ne l’efface en augmentant le volume du grand feutre noir. Il faut dire que les mots du black étaient plus grands, plus ronds, ils parlaient à tout le monde qui scandait son refrain.

Mais le must, l’an passé, c’était la section des Bic. Ils écrivaient à une allure, montant descendant les gammes du Larousse, avec une telle fluidité qu’il m’était difficile de les suivre. Avec ma plume à bec, je faisais tâche à côté du Bic rouge qui paraphait son solo avec brio quand je cherchais encore les mots de mon inspiration, mon instrument à la bouche.

W  h  o  u  a  h   !

Je suis resté bouche bée aussi, je me rappelle, devant ce morceau de rap joué à la craie sur un tableau noir. Les mots grinçaient sur un rythme saccadé, c’était cru, c’était fort.

Qu’ils sonnaient bien ces poèmes en slams sur la scène !

Ah ! … c’est bien simple, la fête des mots dans la rue de la Page blanche, si vous saviez comme on se la raconte, on se croirait dans une parade à la Nouvelle… Orléans.

Et ce n’est pas le Jazz Band du Café de la page blanche qui vous dira le contraire !

Et vous, vous l’imaginez comment la fête des mots demain dans la rue ?

Ce billet est un petit clin d’oeil à la question du boudoir de Phédrienne : la fête des mots, une utopie ?
Quand les idées se rencontrent ! 😉

Le père

On était à la dernière du père, samedi soir.

Le père théâtre Hébertot

Mais non, personne n’est mort ! Je parle de la pièce de théâtre, « Le père » de Florian Zeller qui se jouait au théâtre Hébertot à Paris.

C’était la dernière représentation samedi.

Une mise en scène lumineuse où tout s’emmêle dans la tête du spectateur qui ne sait plus qui est qui et où il est.

Tiens donc !

Tout comme ce père incarné par un Robert Hirsch époustouflant, plus vrai que nature en emmerdeur intelligent qui perd ses repères et la mémoire au fil du temps, du temps de la pièce qui se désintègre sous nos yeux éberlués.

« Mais tu m’avais dit que t’allais plus à Londres ! »

Quelle empathie nous submerge alors ! … Bah oui, elle nous l’avait dit !

Flash-back comme une claque à chaque scène qu’on reçoit ou croit recevoir, on ne sait plus bien. Le décor se fait et se défait sous nous yeux, on sent le père partir, emporté par la maladie, quelle maladie ? Alzheimer, qui n’existe que pour celui qui est en dehors.

Oui mais nous, on est dedans !

Et quand Zeller, ou plutôt le metteur en scène, nous en fait ressortir, par instants, c’est l’effroi qui nous prend à la gorge comme dans cette scène somptueuse où sa fille le laisse dans cette institution pour partir enfin à Londres.

C’est dur, c’est magnifiquement mis en puzzle que l’on reconstitue jusqu’à la dernière pièce.

La dernière ce soir, je vous disais, pour acclamer la performance d’un acteur comme j’en ai rarement vue au théâtre, personnage complexe, tantôt drôle, tantôt émouvant, toujours attachant, un rôle qui vaudra sans conteste à Robert Hirsch au minimum une nomination aux Molières, si ce n’est le titre suprême.

En tout cas, s’il est loin d’être mort en tant qu’acteur, les acclamations sur les planches samedi soir l’ont déjà emporté jusqu’au paradis sous un orchestre de bravos, d’un public debout et aux anges.

Merci monsieur Zeller pour ce grand moment de théâtre !

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Buller à Dublin…

Excuse me, what are you talking about ?

Statues Dublin 2
L’autre jour je bullais dans les rues de Dublin, au petit matin, sur les traces de la décadente, la sulfureuse, croisée la veille, quand elle sort de ses gonds, lorsque la nuit la couvre de son grand chapeau noir et de ses bijoux aussi lumineux qu’éclatants qui ornent une longue robe aux couleurs musicales endiablées, avec un extravagant parfum de fête, je parle bien sûr de la bien nommée et tant convoitée rue du Temple Bar.
C’est clair, tous ceux qui l’ont abordée, côtoyée, embrassée même, vous dirons la même chose.

Elle nous rend dingue !

Avec sa bouche pulpeuse, le rouge aux lèvres, des paillettes au front, un léger fard orangé soulignant des grands yeux verts, elle impressionne par sa forme longiligne et ce coffre fort qui entonne à plein poumons son chant frénétique en choeur avec son pub’s band qui reprend dans un rythme pas moins effréné le même refrain :

Guinness, ô Guinness ! … One more pint !

Je revenais sur les traces de cette nuit aussi inoubliable que coupable, espérant n’y avoir laissé aucune mauvaise empreinte, quand j’ai croisé ces deux femmes, assises sur un banc, bronzées par le gris du ciel sans doute et qui papotaient, un air préoccupé et préoccupant, leurs sacs à leurs pieds. Elles étaient là, juste de l’autre côté du Ha’Penny bridge, sur la rive nord de la Liffey, à l’opposé de l’enfer de la rue de mauvaise vie qui attire ses proies une fois la nuit tombée.
Mais de quoi pouvaient-elles bien causer ? L’augmentation du kilo de tomates au marché à quelques mètres de là ? Le dernier cri des sacs à mains chez Lancel ? A moins que ce ne soit celui d’un corps tombé dans la Liffey la nuit dernière ? Ma curiosité était plus forte que mon accent anglais influent… pas fluent du tout quoi !

Euh… excouse-mi, wha tariou tolkink euboute ?

Je suis sûr que vous avez une petite idée !

Remplissez ces bulles avec ce qui vous vient à l’esprit.

Mon petit doigt me dit qu’elles parlent français !

Des têtes d’enterrement

Mathilde se remarie !                                 Épisode 10  / 15

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Mathilde, 29 ans, mariée, fidèle, rêve toujours de prince charmant, de robe de princesse, nostalgique du plus beau jour de sa vie, dix ans déjà !
Sandrine, meilleure amie de Mathilde, 33 ans, l’âge du Christ, mais rien à foutre, pas croyante, le mariage, très peu pour elle, célibataire, hédoniste de nature, aime faire la fête, danser, boire un p’tit coup, ou deux, et transgresser les codes dès qu’elle peut.
Catherine, Cathy pour les intimes, collègue de Mathilde, 38 ans et toujours célibataire, à fond sur Meetic, rêve de mariage en grand avec une robe blanche, elle y croit !
Lætitia, chef de Mathilde, 45 ans, divorcée, deux enfants, terminé pour elle les mecs qui ne s’assument pas et jouer leur mère au foyer, elle veut voyager et s’éclater, profiter de la vie, quoi !
Joëlle, mère de Mathilde, 57 ans, veuve depuis cinq ans, elle a fait son deuil, mais les hommes, le mariage, c’est de l’histoire ancienne.

Joëlle, le volant collé contre sa poitrine, les yeux plissés, fixe la route droit devant.

— Je sors où, tu m’as dit ?

Lætitia, à la place du passager, lève la tête d’une vieille carte routière.

— Conthey, là ! … hé ! hurle-t-elle, la main gauche sur le volant pour retenir un geste brusque de la conductrice. Doucement Jo ! C’est pas le moment de nous planter !

Un coup de klaxon long retentit derrière la voiture, ce qui a le don d’énerver encore plus la copilote, joignant les gestes à la parole.

— C’est bon, c’est bon ! On t’a pas vu, ça arrive, connard !

Un double bip de téléphone se fait entendre. Cathy a reçu un sms. Lætitia sursaute aussitôt, comme si on venait de la réveiller en plein sommeil paradoxal.

— C’est quoi ça ?
— C’est Régis, répond timidement la coupable, les cheveux plaqués côté vitre et rebiqués de l’autre. Il faut que je l’appelle, on devait aller chez Ikea cette après midi. Du coup, on va devoir reporter. On rentre quand ?
— Ikea, un samedi ? Pouah ! lâche Sandrine, écœurée rien qu’à l’idée.
— Moi, j’adore me balader dans les allées, y a toujours plein de belles choses qui donnent envie de s’installer. Si seulement j’avais une grande maison, avec de la place !

Sandrine, coincée à l’arrière entre Mathilde et Cathy, des paupières rimmellisées comme un buvard absorbant le noir qui fait tache, démonte le rêve en kit de sa voisine :

— Une allée fléchée que tout le monde emprunte, c’est bien l’idée que je me fais du mariage… Pff !

— Hep hep hep ! s’affole Lætitia, tournée vers l’arrière pour arracher le portable des mains de  l’inconsciente. Éteins-moi ça ! T’es malade, tu veux qu’on aille en tôle ou quoi ?
— Hein ? ne comprend pas Cathy. Mais, je ne fais rien de mal…
— Tu vas justifier comment aux flics que t’étais en Suisse ? … Merci SFR !
— Bouygues…
— Bouygues ou Orange, tu seras marron ! … Mais putain, faut vous le dire comment ? … On a un mort sur les bras !

Les filles restent scotchées à leurs sièges, soudain conscientes que la situation est grave. Mathilde, les yeux rougis et gonflés, renifle pour ne pas pleurer, au risque de se faire à nouveau engueuler.

— Depuis ce matin on est dans ma maison de campagne dans l’Yonne, OK ? … On rentre dimanche soir. Jusque-là, pas de carte bleue, pas de téléphone, pas d’identité, RIEN !

On n’est pas là, ON N’E-XIS-TE-PAS ! … C’est clair ?

Personne ne bronche. Lætitia, complètement rincée, tente d’apaiser ses propos.

— On fait ça pour Mathilde… On va s’en sortir, les filles, ajoute-t-elle avant de se remettre face à la route. On va s’en sortir.

— Je prends où là ? demande la petite voix cramponnée au volant.
— Tout droit… jusqu’au pont du Diable. Je te dirai après.

Une heure plus tard. Sur le fameux pont diabolique. Cathy frissonne, le nez collé à la vitre.

— Ça donne le vertige !
— Impressionnante, la vallée, confirme Sandrine par dessus l’épaule de sa voisine. Elles sont énormes ces montagnes !
— Au loin y en a une dont le sommet s’appelle le Sex Noir, ajoute Lætitia, enfin détendue.
— Ah oui… On voit la forme du vagin, s’en amuse Sandrine, feignant de le viser du doigt.
— Y a de ça ! sourit la fille du coin.
— N’importe quoi ! lâche Cathy en haussant les épaules.
— Mais si ! insiste Sandrine, pointant son index au loin, toujours avec son humour grivois. En haut du col de l’utérus, là ! Ils en ont même fait une piste de ski… T’es miro ou quoi ? On voit même les tire-fesses !

Le rire est général. Moins tant pour la blague que pour le relâchement que les filles s’autorisent enfin. Elles respirent et commencent chacune à croire qu’elles vont s’en sortir.

— Prends le chemin, là ! ordonne Lætitia. On va suivre la Morgue.
La morgue ? s’inquiète Sandrine.
— Tout le monde l’appelle comme ça. En fait, la rivière s’appelle la Morge.
— Mais, y a que des gros cailloux, s’affolent la conductrice.
— Je sais, avance ! Le 4×4 est assez haut. C’est un chemin privé. Derrière, il y a un terrain de trente hectares. Autrefois il appartenait à mon grand père. Il l’a vendu pour rien à une mafia suisse.

— Y a des mafias suisses ?

— Qu’est-ce tu crois, Cathy ? Partout où tu as de l’argent, tu as des mafias qui gravitent autour. C’est comme les planètes avec les étoiles. C’est une loi universelle.
— Et si on croise quelqu’un ? demande Sandrine, pas rassurée.
— Ça ne risque pas. À moins d’assister à un autre enterrement. C’est un vrai cimetière d’affaires ici. Tout le monde le sait et personne ne dit rien.
— C’est dingue ! Cathy n’en revient pas.
— C’est leur manière d’être neutres… Tiens ! prends à droite là, s’interrompt la copilote, il devrait y avoir encore une vieille cabane du temps de mon grand-père.

La cabane n’a pas bougé. Dedans, il y a tous les outils pour creuser, piocher, bêcher, enterrer tout ce qu’on veut, quoi. Comme un self-service pour bandits en cavale. Le corps de Paul, couché dans une brouette, deux pelles, une pioche dessus, voilà les filles suivant le corbillard poussé par Lætitia.

— Suivez-moi, je connais un petit coin où Paul reposera en paix.

Lætitia puis Sandrine, un peu Joëlle, à peine Cathy, pas du tout Mathilde, en larmes, puis à nouveau Lætitia, toutes en sueurs, creusèrent, tour à tour, et finirent par jeter le cadavre dans un trou immense avant de le reboucher ensemble. Une heure plus tard. Mathilde dans les bras de sa mère, les deux bouleversées, signes de croix et Notre père, en passant par des Je vous salue Marie, elles n’en finissent pas de se recueillir sur l’emplacement du défunt, sans le moindre signe ostentatoire, Lætitia ayant été très claire.

— Allez on y va, ordonne la chef de la bande en cavale. On n’a que trop tardé. Il faut mettre de l’essence. Pas question de carte bleue. Donnez-moi tout votre argent, Paul nous fera vivre en Italie. Va falloir s’acheter des fringues aussi.
— Pourquoi aller en Italie ? demande Cathy, épuisée. Il est enterré maintenant.

— Si en Suisse, y a pas meilleure tombe, en Italie, y a pas mieux pour faire vivre les morts !


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La cage dorée

Comment cuisiner des clichés à la mode portugaise dans une comédie attachante et intelligente ?

La cage doréeOn le sait, en France il y a autant de blagues sur les portugais qu’il y a au Portugal de façons de cuisiner la morue, à faire dresser les poils de tous les enfants d’immigrés lusitaniens dont je fais partie.

Et là, Ruben Alves s’y prend comme un chef pour assaisonner ses stéréotypes, à toutes les sauces, de la concierge boniche idéale à l’ouvrier bosseur irréprochable en passant par les commérages, les drapeaux, fanions, tissus aux couleurs nationales en tout genre et en tout lieu, l’addiction au Futebol, la bière et la morue… faits maison !  … et j’en passe.

Ca sent à des kilomètres, comme des sardines sur un gril, dans des seconds rôles de composition à l’eau de rose… de Rosa précisément dont chaque apparition fait saliver avant qu’elle lâche quelques jurons ou mimiques très caractéristiques pour qui a eu une tante portugaise en France. « Porrrra ! »

Tout y passe jusqu’à la bourgeoise de l’immeuble incarnée par une Nicole Croisille tout à fait crédible et un invité surprise en fin de film (chiouu !). Mais la palme de la mangeuse de sardinas assadas revient sans conteste à Chantal Lauby qui s’est imprégnée du rôle de Solange Caillaux, femme du patron de José, en y mettant carrément les mains.

Elle est à pisser de rire, surtout quand elle s’improviche en conchierge Coulada, cousine de Maria. Un grand moment !

Mais ce film ne s’arrête pas à la pure caricature comme on peut la trouver sur Internet.

On trouve chez Ruben Alves un peu de Guédiguian visitant la communauté portugaise en France. Il peint dans son tableau des sentiments comme des personnages que l’enfant d’immigrés que je suis a retrouvé non sans un pincement au coeur.

La honte, la révolte, ce devoir de bien faire pour s’intégrer, cette peur, toujours, d’être mal vu.

Et si même dans ce film, il en ressort une sorte d’anachronisme, tant ces personnages dépeignent plutôt les immigrants de la première génération, jusqu’à la fin des années 80 (allez trouver de nos jours les Maria et José du film, leurs enfants à la rigueur), il n’empêche que l’on s’y laisse prendre volontiers, tant Ruben Alves parvient à nous faire rire, à nous émouvoir et même à nous surprendre.

Et c’est ça qu’c’est bon !

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avis d’expo, de spectacle ou encore avis de théâtre !

Dans la nature…

Mathilde se remarie !                                 Épisode 9  / 15

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Mathilde, 29 ans, mariée, fidèle, rêve toujours de prince charmant, de robe de princesse, nostalgique du plus beau jour de sa vie, dix ans déjà !
Sandrine, meilleure amie de Mathilde, 33 ans, l’âge du Christ, mais rien à foutre, pas croyante, le mariage, très peu pour elle, célibataire, hédoniste de nature, aime faire la fête, danser, boire un p’tit coup, ou deux, et transgresser les codes dès qu’elle peut.
Catherine, Cathy pour les intimes, collègue de Mathilde, 38 ans et toujours célibataire, à fond sur Meetic, rêve de mariage en grand avec une robe blanche, elle y croit !
Lætitia, chef de Mathilde, 45 ans, divorcée, deux enfants, terminé pour elle les mecs qui ne s’assument pas et jouer leur mère au foyer, elle veut voyager et s’éclater, profiter de la vie, quoi !
Joëlle, mère de Mathilde, 57 ans, veuve depuis cinq ans, elle a fait son deuil, mais les hommes, le mariage, c’est de l’histoire ancienne.

Le jour s’étirait au fil des kilomètres avalés par le Range Rover rouge au toit crème.

Depuis une heure, le 4×4 ne cesse de balloter les corps enchevêtrés à l’arrière. Mathilde, blottie comme un chaton contre le ventre de sa maman, deux vestes sur le dos, dort à poings fermés. Joëlle, dont la tête tape contre la vitre à chaque virage, rouvre et referme les yeux tels des warnings d’un sommeil impossible. Cathy a trouvé un confort appréciable sur une fesse en travers de sa collègue, se relevant de temps à autre pour ne pas vomir. Sandrine, elle, n’a pas dit un mot depuis près de cinq heures qu’elles roulent, perdue dans ses pensées qui se fondent dans un paysage changeant défilant à vive allure. Elle se tient à la poignée du passager avant pour ne pas basculer côté conducteur où Lætitia, imperturbable, le pied sur l’accélérateur, l’autre sur le frein, les yeux tantôt dans les rétros tantôt droit devant, fume clope sur clope pour ne pas s’endormir, la vitre toujours entrouverte.

Le moteur a cessé ses vibrations. Des cheveux en bataille surgissent entre les sièges avant.

— Pourquoi on s’arrête ? demande Cathy.

Lætitia, des cernes effroyables sous les yeux, jette son mégot par la fenêtre et ouvre en grand sa portière, comme une libération. « Whouaaa ! »

— On sort se dégourdir les jambes, les filles. À deux kilomètres, c’est la frontière.
— On est déjà en Italie ?
— La Suisse, ma petite Cathy. Poste frontière de Vallorbe. On passait toujours par là avec mes parents quand on allait voir mon grand-père.
— Il est suisse ?
— Il était, rectifie Lætitia en sortant du 4×4. Allez, dehors, les filles ! Il va falloir s’apprêter.

Sandrine ouvre à son tour sa portière et étire ses jambes à l’extérieur, dans un cri de lionne qui renforce son tempérament sauvage. Joëlle et Mathilde sortent en bâillant, amorphes.

— Houuu ! mais il fait froid ici, se plaint la fille. Qu’est-ce qui se passe ? On est où ?
— En Suisse, il paraît, répond aussitôt Cathy qui la suit.
— On fait une pause de vingt minutes, ajoute la chef de la bande. Le temps de se recoiffer et d’être présentables au contrôle.
—  Mais pourquoi on passe par la Suisse ? s’étonne Sandrine. C’est risqué, et s’ils nous demandent d’ouvrir le coffre ?
— Je sais, mais comme disait mon grand-père :

Ce pays renferme dans ses coffres autant de cadavres que d’argent exilés !

— Attends, vient de comprendre Sandrine, parce que tu comptes l’enterrer là ?
— Dans le mille. Ici, tous les secrets sont bien gardés, crois-moi !

Voilà que Mathilde se remet à pleurer.

— Paul ! Bouuuh !
— Ah, non ! Tu ne vas pas  remettre ça, l’arrête de suite Lætitia, sur les nerfs. Allez, au maquillage ! On s’apprête comme si on allait au bureau. J’ai emmené tout ce qu’il faut.

Une demi-heure plus tard. Poste frontière de Vallorbe.

— « Le Creux », lit à voix haute Cathy sur une pancarte. Ça porte bien son nom, ça me rappelle la Creuse.
— Pour être dans la nature, on est dans la nature ! confirme Sandrine, en pure Parisienne.

Un douanier s’approche du véhicule stoppé à une barrière. S’adressant à la conductrice avec un accent bien caricatural comme on n’en fait plus dans ce pays :

— Booonjouuur madaaame. Veuillez vous raaanger iciii, j’vous priiie !

C’est un jeune homme d’une trentaine d’années, l’air un peu coincé, en juge Lætitia au premier abord.

— Vous alleeez où, j’vous priiiie ? V’z’êtes en weeeek-ennnd ?
— On va àaaaa… Lausanne. Euh… On bosse toutes là-bas. Je fais du covoiturage.
— Ah ! C’est bieeen çaaa, de penser à l’envirooonnemeeent ! Vous n’avez rieeen à déclareeer j’suppoooose.
— Aucune arme illicite monsieur le douanier, lâche Lætitia avec sa voix la plus sensuelle, tout en jouant du décolleté, préparé à cette occasion.  À ma connaissance.

Le jeune homme n’est pas insensible aux charmes palpables de cette quarantenaire.

— Me v’laaa rassurééé, plaisante-t-il en retour. Pouvez-vouus juste m’ouvrir le coooffre, j’vous prie ? Siiimple routiiiine.

Un vent de panique balaye l’arrière de la voiture. Lætitia tente de calmer Mathilde et Cathy aussi blanches que des souris dans un laboratoire.

— Qu’est-ce tu comptes  faire ?
— On se calme, les filles. Bougez pas ! … Pas de panique ! Pas de panique ! … Passe-moi mon sac à main qui est sur la plage arrière.
— Mais… tu ne vas pas…
— Tais-toi, bon sang, Cathy, tu vas attirer l’attention. Passe-moi ce sac, bordel !
— Oui oui…

En sortant, Lætitia appuie discrètement sur le bouton de verrouillage automatique des portières. Elle retrouve le douanier, déjà derrière le 4×4, et fait acte d’ouvrir le coffre, logiquement verrouillé.

— Ah, je n’ai jamais su comment on ouvre ce fichu coffre. C’est tout mon mari ça. Il voulait un Range Rover. J’ai horreur de ces bagnoles. En plus, ça pollue, si vous saviez !
— Oh ouiii! Moi, j’suis comme vouuus, très sensiiiible à la pollutiooon d’ces voituuures. On en voit d’plus en plus par iciiiii. Moi, j’ai un Raleigh Dover 40 !
— Désolé, mais j’y connais rien en bagnole !
— C’est un vélooo électriiiique ! Ah ah ! J’vous ai bieeen euuue. Avec ça j’polluuuue rieeen et en plus j’fais du spooort !
— Ah! D’accord. C’est génial ! s’exclame la conductrice, tentant de jouer la montre avec le Suisse. Comment vous dites ?

— Raleigh Dover 40. C’est le tooop, j’vous assuuuure ! 

Lætitia feint d’ouvrir le coffre une nouvelle fois.

— Décidément, ça a l’air coincé.
— Laisseeez moi faiiire !

Le douanier tente la manœuvre à son tour. En vain.

— On dirait qu’c’est bien verrouillééé. Vous pouveeez donner un coup de clééé pour forcer le machiiin ?

La conductrice s’exécute en appuyant consciemment sur le bouton inverse, histoire de faire entendre un clic. L’homme retente d’ouvrir le coffre, logiquement sans succès.

— C’est un mooonde, ces engins-làààà ! s’agace-t-il.

Lætitia prie dans son for intérieur pour qu’il abandonne, la main tremblante dans son sac. Quand un fait inattendu vient perturber le contrôle en cours. Un bip discontinu provenant d’une énorme montre à son poignet.

— Ah ! Il est neuf heuuures ! C’est le momeeent de la relèèève. Bon alleeez, vous pouvez  circuleeeer… Ça iraaa pour cette foiiis !
— Merci, merci, Monsieur ! expire Lætitia, dans un soulagement sans commune mesure. Ça a été un réel plaisir de vous connaître. Dès que je rentre, comptez sur moi pour étudier votre vélo électrique là… Le Roller Dove, vous dîtes ?

Raleigh Doveeeer 40. Un petit bijouuu dans les montééées ! lâche-t-il, tout content.

Les filles à l’arrière, à deux doigts de la syncope, le remercient de gestes et sourires affectueux comme s’il venait de leur sauver la vie.

— Merci encore ! répète la conductrice, à nouveau au volant. Au revoir !
— Au revoiiir ! et bon couraaage !
— Il en faut, croyez-moi, il en faut !

Le 4×4 démarre en trombe, lâchant une fumée épaisse nauséabonde en plein dans le visage du brigadier. Cathy, la première, pose la question qui taraude les autres.

— Tu ne comptais pas le… ?
— Je ne sais pas, je ne sais plus, se contente de répondre l’intéressée, soufflant et ouvrant la vitre pour respirer. On se tire d’ici.
— À cinq minutes près, on allait savoir, lâche Sandrine qui semble avoir sa petite idée.
— C’est derrière nous, conclut Lætitia. On fait une halte après Lausanne, on prend un petit déj’ et on avise pour la suite. Je suis morte. J’ai besoin d’un double café moi, je tiens plus !

Qui pourra prendre la relève pour la conduite ?

Personne ne répond. La chef les interroge du regard, Sandrine la première.

— J’ai pas le permis !
— Ah bon ?
— Qu’est-ce que tu veux que j’en fasse à Paris. J’ai le Vélib’, le métro et le taxi. Pour l’étranger je prends le train ou l’avion. Je vois pas où est le problème ?
— Ça va, ça va ! Et toi Cathy ?
— Ben, j’ai bien essayé. Huit fois, même. Mais ils n’ont jamais voulu me le donner. Pourtant c’était pas de ma faute, la dernière fois…
— C’est bon, c’est bon ! Mathilde ?
— Moi je l’ai. Mais j’ai jamais reconduit depuis le jour où on me l’a donné. Paul, il disait…

Là voilà qui se remet à chialer, désespérant encore plus Lætitia. Pitié ! Joëlle prend sa fille dans ses bras, une habitude depuis qu’elles sont parties.

— Ma chérie… Chuuu… Je prendrai la relève, Lætitia. Ça me reviendra bien en roulant.
— Tu parles d’une génération d’indépendantes !  se désole la conductrice, anéantie.
— Pourquoi tu dis ça ? ose demander Cathy.
— Parce que la bagnole, dans l’histoire de la lutte des femmes, c’est un acquis les filles ! … Mettez-vous ça dans le crâne !

Laissez jamais un mec conduire à votre place, putain !

Lætitia est sur les nerfs. Elle roule aussi vite qu’elle voudrait que cette cavale se termine. Personne ne bronche derrière, ni devant.


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Buller dans mon jardin

Hein ? … Quoi ? … Qu’est-ce qu’elle a dit ?

Vénus - Jardin de Versailles
L’autre jour je bullais dans mon jardin, à Versailles. Quand je dis mon jardin, ce n’est pas tout à fait le mien, disons que je le partage avec d’autres. Ce serait même plus juste de dire que c’est le notre, d’autant que c’est le sien… à Le Nôtre, de jardin ! … Vous me suivez ?
Je bullais l’autre jour dans son propre jardin, taillé comme une belle barbe pour un grand événement. Et pour cause, c’était le sien à Le Nôtre, d’évenement… son anniversaire, vous m’en direz tant… 400 ans le Dédé !

A la vôtre, monsieur Le Nôtre !

semblaient murmurer de drôles de sculptures d’arbres, le vert à la main… celle d’un certain Giuseppe Penone, chef de file de l’arte povera, je lis sans bien saisir. Peu m’importait…
Je bullais donc dans ce jardin, le notre, remontant une des allées qui longent le parterre de Latone, celle de droite précisément en direction du château. Je sais que cette précision sera appréciée par les amateurs de callipyges au temps compté ou encore aux pieds usés.
Quand je suis tombé nez à nez… ou plutôt des nues à nu avec le plus beau fessier du parc. Quelle splendeur ! pensais-je.  C’est là qu’une voix divine qui provenait de plus haut (forcément) s’est fait entendre… Je relevais la tête. Hein, quoi ?
Je ne sais pas si vous avez remarqué comme moi, mais on ne comprend jamais ce que disent les statues tellement elles parlent dans leurs marbres.
Mais qu’est-ce qu’elle a bien pu dire ?

Je suis sûr que vous avez une petite idée !

Remplissez cette bulle avec ce qui vous vient à l’esprit.

Avec juste un peu de subtilité féminine !

La remariée était en noir…

Mathilde se remarie !                                 Épisode 8  / 15

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Mathilde, 29 ans, mariée, fidèle, rêve toujours de prince charmant, de robe de princesse, nostalgique du plus beau jour de sa vie, dix ans déjà !
Sandrine, meilleure amie de Mathilde, 33 ans, l’âge du Christ, mais rien à foutre, pas croyante, le mariage, très peu pour elle, célibataire, hédoniste de nature, aime faire la fête, danser, boire un p’tit coup, ou deux, et transgresser les codes dès qu’elle peut.
Catherine, Cathy pour les intimes, collègue de Mathilde, 38 ans et toujours célibataire, à fond sur Meetic, rêve de mariage en grand avec une robe blanche, elle y croit !
Lætitia, chef de Mathilde, 45 ans, divorcée, deux enfants, terminé pour elle les mecs qui ne s’assument pas et jouer leur mère au foyer, elle veut voyager et s’éclater, profiter de la vie, quoi !
Joëlle, mère de Mathilde, 57 ans, veuve depuis cinq ans, elle a fait son deuil, mais les hommes, le mariage, c’est de l’histoire ancienne.

Une heure plus tard, on sonne.

Cathy sursaute, comme si la police était à la porte. Sandrine prend les choses en mains, comme depuis le début de cette sale histoire.

— Bougez pas, je vais voir ! C’est sûrement Lætitia.

Effectivement, c’est bien elle, mais elle n’est pas venue seule, à sa grande surprise.

—  Ben quoi ? Elle était avec moi, j’allais pas lui dire… Enfin, il s’agit de sa fille !
— Oui, bien sûr. Bonsoir Joëlle, heu… attendez-moi là, juste un instant, je reviens.
— Qu’est-ce qui se passe ici à la fin ? s’impatiente la mère qui flaire le drame.

Sandrine retourne dans le salon, histoire de préparer la fille à la venue de sa mère. Seulement, les deux invitées ne lui en laissent pas le temps, elles l’ont suivie.

— Maman ? appelle Mathilde, après avoir cru reconnaître la voix maternelle.

Joëlle entre la première et se jette dans les bras de sa fille, toute heureuse de la savoir saine et sauve.

— Ma chérie ! Tout vas bien ?
— Oui oui, maman !

Lætitia découvre la première le carnage, le sang sur le tapis et la silhouette d’un corps recouvert d’un drap.

— Nom d’un chien, mais qu’est-ce qui s’est passé ?

Joëlle pousse un cri d’effroi en heurtant le corps à ses pieds. Elle vacille. Sandrine la rattrape in-extrémis et la fait s’asseoir sur le canapé.

Assieds-toi aussi, Lætitia ! Je vais tout vous expliquer.

Dix minutes plus tard. Mathilde est en sanglots dans les bras de sa mère, comme une petite fille qui vient de faire une énorme bêtise.

— Pardon ! Maman, j’voulais pas.  Ça a été horrible… hanc ! Pardon !

Joëlle est au bord des larmes également. Elle tente de trouver les mots pour réconforter sa fille, murmurant d’une voix à peine audible.

— Ma fille… Mon bébé ! … Ce n’est pas de ta faute… Comment est-ce encore possible ? Nous sommes maudites avec les hommes !

Lætitia presse l’épaule de Joëlle dans un geste de compassion, retenant toute émotion. C’est qu’il s’agit désormais d’avoir les idées claires.

— Bon bon… Ne paniquons pas ! … On se calme, les filles ! … Pas de panique, on va s’en sortir ! PAS-DE-PANIQUE !! …  … laissez-moi réfléchir !

Et quand Lætitia réfléchit, rien n’est laissé au hasard. Elle n’était pas la chef pour rien, au bureau. Ça dépotait avec elle. Et ça n’a pas tardé, trois minutes plus tard.

— Dans le sac poubelle, là, je veux tout ce qui a touché de près ou de loin à la victime.
Ses fringues, la robe, les serpillères, le tapis !
Oui oui, ta culotte aussi Mathilde ! Prend une douche et va te changer !
Non, le pistolet, je vais le prendre dans mon sac pour l’instant.
Hop hop hop, malheureuse, donne-moi son portable ! Une aubaine !
Laisse-moi faire, on verra plus tard !
Ses papiers aussi, son blouson. On va pas le laisser sortir à poil.
Tu connais son code de carte bleue ?
T’es un génie, Mathilde ! J’suis bête, t’es juste sa femme !

— C’est quoi ton plan au juste Lætitia ? s’intéresse de près Sandrine.
— Il faut arriver à le faire vivre encore un peu, mais loin d’ici. Tu me suis ?
— Pas complètement, mais tu vas me dire.
— Comme dans Volver ! s’exclame soudain Cathy.
— Hein ? ne comprend pas Lætitia.
— Mais on n’a pas de congélateur assez grand.

T’es lourde, Cath’, avec ton congèl’ !

Lætitia continue de dérouler sa stratégie .

— On va utiliser son fauteuil de bureau roulant pour l’emmener jusqu’à la voiture. Dans une heure, on décolle. Il faut que la maison soit aussi nickel que d’habitude.
— Ce serait bien la première fois, fait remarquer Joëlle.
— Pourquoi tu dis ça, maman ?
— Ne le prends pas mal, ma chérie. Mais le ménage et toi, on ne peut pas dire que c’est le grand amour.

Mathilde se remet à pleurer.

— Ah non ! l’interrompt Lætitia, ça suffit ! Tu ne vas pas remettre ça. Maintenant tu vas être une grande fille ! Tiens, va remettre un peu de ton bordel dans ta chambre, qu’on n’ait pas l’impression que tu viens d’emménager.
Hanc ! Oui…
Ensuite, prends une douche et change-toi !  … Et ta robe, à la poubelle, n’oublie pas ! Cathy, aide-la, si tu veux bien. Et ramène-nous un costume de monsieur, là. Un chapeau et ses lunettes de soleil aussi.
— Pour quoi faire ? demande curieusement Cathy.
— Pour qu’il soit présentable, au cas où.
— Han !
— Je ne pige pas tout, dit Sandrine, mais pourvu qu’on déguerpisse d’ici au plus vite.

Une heure trente plus tard.

— Les filles, discrètement, on emmène le corps dans le fauteuil jusqu’à la voiture.
Appelez l’ascenseur !
Cathy, Joëlle, les sacs, dans le local poubelle !
Sandrine, aide-moi à pousser le fauteuil, l’ascenseur est là.
Mathilde, attends-moi je reviens avec le chariot.

« 3h17 » s’affiche sur le tableau de bord du 4×4. Le silence dans la rue est total. Un tour de clé de contact et le ronflement du moteur diesel le brise comme un éclat sur le pare-brise. Un frisson parcourt les filles.

— Allez, on met les voiles !

— J’ai froid, se plaint Mathilde. Tu ne veux pas relever la vitre, s’il te plaît ?
— Non, réplique le chauffeur. Fais comme moi… RESPIRE !
— On va où ? ose demander Cathy.

— Venise ! …  Hein, Paul ? lance Lætitia dans le rétro, en direction du coffre.


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La parodie du président

Et si vous étiez Gérard Lenorman…

répondant à François le normal, président de la république ?

Notre président, au plus bas dans les sondages, semble avoir le moral dans les chaussettes. Il n’a pas le coeur à chanter, il déchante même chaque jour, de couacs en quoi qu’il dise ou qu’il fasse.

Alors, le Gérard qui est en vous pourrait peut-être lui redonner le sourire…

Imaginez !

Il était une fois… chez le psychanalyste, au conseil des ministres, inventez la suite…

Un grand garçon rond au regard un peu triste
Il attendait juste une phrase magique
On lui dit simplement: Si j’étais (vous) Président
Si j’étais président de la République…

A vous !

(Chanson originale)
Il était une fois à l’entrée des artistes
Un petit garçon blond au regard un peu triste
Il attendait de moi une phrase magique
Je lui dis simplement : Si j’étais Président
Si j’étais Président de la République
Jamais plus un enfant n’aurait de pensée triste
Je nommerais bien sur Mickey premier ministre
De mon gouvernement, si j’étais président
Simplet à la culture me semble une évidence
Tintin à la police et Picsou aux finances
Zorro à la justice et Minnie à la danse
Est c’que tu serais content si j’étais président ?
Tarzan serait ministre de l’écologie
Bécassine au commerce, Maya à l’industrie
Je déclarerais publiques toutes les patisseries
Opposition néant, si j’étais Président
 Si j’étais Président de la République
J’écrirais mes discours en vers et en musique

Et les jours de conseil on irait en pique-nique
On f’rait des trucs marrants si j’étais Président
Je recevrais la nuit le corps diplomatique
Dans une super disco à l’ambiance atomique
On se ferait la guerre à grands coups de rythmique
Rien ne serait comme avant, si j’étais président
Au bord des fontaines coulerait de l’orangeade
Coluche notre ministre de la rigolade
Imposerait des manèges sur toutes les esplanades
On s’éclaterait vraiment, si j’étais président !
Si t’étais Président de la République
Pour nous, tes p’tits copains, ça s’rait super pratique

On pourrait rigoler et chahuter sans risques
On serait bien contents si t’étais Président
Je s’rais jamais Président de la République
Vous les petits malins vous êtes très sympathiques
Mais ne comptez pas sur moi pour faire de la politique
Pas besoin d’être Président, pour aimer les enfants
Laissez aller votre imagination… Amusez-vous !